AME_01Depuis la démocratisation des réseaux informatiques, la proportion des couples qui se rencontrent et se forment par le biais de site de rencontres ne cesse de croitre. Ces mêmes sites ont su ne pas fatiguer la poule aux œufs d’or en sachant se renouveler et proposer des services toujours plus innovant aux célibataires venant chercher l’âme sœur sur leurs pages.

Les sites de rencontres partaient pourtant avec certains handicaps : une image plus que désuète liée à une filiation non revendiquée avec les agences matrimoniales de la deuxième moitié du XXe siècle. Un autre héritage encombrant fut celui des sites de rencontres qui firent les belles heures et la fortune d’investisseurs du vieux Minitel français. Ces sites télématiques étaient plus tournés vers une sexualité de consommation que vers la quête de l’amour, avec un grand A.

Et pourtant, le constat est bien là : de nos jours, plus de 3 couples sur 7 se rencontrent grâce à ce genre de sites.

Dans nos sociétés modernes qui tendent vers le « zéro défaut », ces mêmes sites sont aller chercher les outils qui leur permettraient, de manière plus ou moins objectives, de proposer des services toujours plus précis dans la manière d’appairer les millions de profils que se bousculent dans leurs bases de données ! Le profilage psychologique statistique a fait place à des analyses « pilotées » par des Intelligences Artificielles. Par ailleurs, à l’instar de l’économie réelle, des mouvements de concentration ont permit de fusionner des bases de données ouvrant à la consultation d’un nombre de profils toujours plus important…

Dernière évolution en date : le profilage génétique, souvent appelé « compatibilité physiologique » (ou tout autres termes plus ou moins poétiques…) : Les célibataires qui le souhaitent peuvent fournir leur « carte d’identité génétique » (si vous n’en n’avez pas, le site peut vous la faire établir moyennant une modique somme, le client est roi). Une fois collectées ces informations entreront dans la multitude des critères analysés par les IA en vue de proposer à l’impétrant des propositions de conjoints toujours plus en adéquation avec ses attentes de vie de couple. Que le célibataire cherche une personne proche ou lointaine de son univers, qu’il soit en attente d’une vie cosmopolite ou aventureuse… Les critères génétiques entreront désormais en compte dans les analyses.

Ces nouveaux services ont été rendu possibles grâce à diverses évolutions. D’une part, l’accélération continue des moyens technologiques que ont rendu possible la généralisation et l’accès à faible cout du séquençage génétique. Il faut aussi prendre en compte la compréhension pratique de ces « lignes de code » issues de ces séquençages : Chaque gène est aujourd’hui identifié, plus particulièrement ceux qui déterminent un caractère du phénotype (exprimé sur le plan physique, apparent) de l’individu humain. En dernier lieu, il aura fallu attendre l’apaisement des passions autour des manipulations génétiques et surtout le cadre légal qui en permet l’utilisation hors du cadre médical.

Ces sélections de conjoints prenant en compte la génétique des deux parties ne sont pourtant pas neutres. D’une manière moins directe, elles peuvent permettre à des couples d’orienter la procréation de leur descendance en évitant, pour une part, les formes les plus intrusives de la gamétogénèse artificielle et sélective (GAS : génération de gamètes à partir de cellules souches dans le but de procréer un individu qui portera statistiquement certains caractères physiques : sexe, couleur des yeux, des cheveux, de la peau, taille, annulation de la prévalence à certaines maladies…).

Les luttes autour de ce que certains appellent l’eugénisme masqué sont loin d’être fini. Nombre d’associations confessionnelles ou non trouvent dans ces nouveaux comportements et services un nouveau sujet à récrimination, plus ou moins relayés par les politiques qui oscillent entre le choix du progrès, celui de la liberté individuelle et la protection d’un certaine conception de l’humanité, forme elle-même décriée par les tranhumanistes, fervents défenseurs de la maitrise de la procréation humaine par voie du génie génétique.

© Olivier Parent – prospective.lecomptoir2.pro

8 nov. 2010