ALITA BATTLE ANGEL ou « Que peut-il sortir des déchets de l’humanité ? » | Ce que la SF nous dit sur demain | Huffington Post |
Deux ou trois choses que « ALITA BATTLE ANGEL », le film de Robert Rodrigez, nous dit sur demain… 
« Dis-moi quel film tu regardes, je te dirai quel avenir tu te prépares » parole de prospectiviste…


Durée : 122 min.
Année : 2019

Alita Battle Angel, le dernier film de Robert Rogriguez, est l’adaptation plutôt réussie du manga Gunnm créé en 1990 par Yukito Kishiro. Il peut aussi être regardé comme la mise en images de l’avènement de tous les rêves des Transhumanistes, ces techno-enthousiastes qui veulent voir mis en œuvre tout ce que, sous peu, la technologie permettra pour améliorer les humains… si ce n’est que, dans le film, le rêve aurait tourné au cauchemar !

L’action se déroule au XXVIe siècle, trois cents ans après une guerre fratricide entre humains terriens et humains martiens, les combats voyant s’affronter des super Rambo augmentés. Ce conflit a entraîné un effondrement de la civilisation. Une autre conséquence en est l’émergence d’un monde divisé en deux : il y a, tout d’abord, sur le sol de la Terre, une ville post apocalyptique, Iron City où règne la loi du plus fort.

Et puis, dans les airs, comme un couvercle d’acier au dessus d’Iron City, il y a une ville flottante. Cette ville, Zalem — est-ce une référence à peine masquée à la Jérusalem céleste des chrétiens, leur paradis perdu ? — semble parfaite mais elle demeure inaccessible aux habitants d’Iron City. Alors tendent vers elle toutes les aspirations, tous les fantasmes de ceux qui vivent sur le sol et qui espèrent des jours meilleurs.

La notion d’ascenseur social prend ici toute sa valeur tant la métaphore est proche de la réalité, si ce n’est que cet ascenseur ne fonctionne que dans un sens, celui des déchets qui, depuis Zalem, sont déversés sur Iron City. Là, les pauvres vivent des détritus d’une élite dont on ne sait rien. En levant la tête, on aperçoit bien, au bord de cette cité surplombante, une falaise faite d’immeubles high tech qui brillent de mille feux dans le soleil couchant. Et Nova, le méchant du film et habitant de Zalem, est doté de capacités qui vont bien au-delà de celles des technologies en usage dans Iron City.

En plus des inégalité de niveau de vie entre Zalem et Iron City, la fusion homme-machine tant espérée par les Transhumanistes vient encore accentuer les inégalités citoyennes. En effet, dans le monde d’Alita, nul ne sait de quels capacités sera doté la personne que l’on rencontre, avec qui on travaille, avec qui on doit négocier, se battre… Et pourtant, dans Iron City, cyborgs et humains non améliorés se côtoient au quotidien.

Pour mémoire, le mot cyborg est la contraction de l’anglais “cybernetic organism”, la cybernétique étant la science qui, par exemple, permet à un sourd d’entendre au moyen d’un implant cochléaire, ce dernier créant le pont entre un signal biologique, l’influx nerveux, et un autre informatique.

Demain, la cybernétique fera encore mieux… bien mieux. C’est ce que montre Alita Battle Angel : le film débute dans un esprit cyberpunk, très mécanique, boulons, engrenages et graisse, d’autres technologies plus avancées, comme les nanotechnologies, font partie d’un monde perdu qui date d’avant le conflit entre la Terre et Mars.

Alors, le film met en scène toutes les améliorations biomécaniques possibles et imaginables : mains couteaux suisses, pieds à roulettes, corps “bodybuildés” et dopés au liquide hydraulique… et comme Iron City est une vrai jungle où les humains sont des loups prêts à s’entre-déchirer, tous les coups sont permis pour pirater, voler, arracher les prothèses des uns pour les revendre au plus offrant.

Cette profusion d’améliorations biomécaniques pose une question essentiel que l’on pourrait formuler ainsi : Jusqu’où l’homme est-il prêt à aller pour se libérer des contraintes de son corps biologique ? Car le monde d’Alita, comme ceux décrits dans bien d’autres récits de fiction, suggère que les sociétés de demain, sous l’influence des technologies d’amélioration de l’humain, seraient plus ou moins condamnées à évoluer vers des systèmes dérégulés et ultra concurrentiels.

Toutes ces considérations, ramenées dans notre présent, doivent nous interpeller. Nos sociétés sont encore sur le pas de porte de l’augmentation de l’humain. Aujourd’hui, tout ce qui est entrepris pour développer des prothèses, des extensions biomécaniques du corps de l’humain, tout cela demeure motivé par la nécessité médicale : les sourds entendent, sous peu certains aveugles pourraient bien voir à nouveau, tout comme des handicapés pourraient retrouver l’usage de certains de leurs membres.

Notre monde est en pleine mutation, c’est ce qui le rend aussi bien excitant… qu’effrayant. Demain, le marché des greffes de prothèses de nouvelles générations pourrait bien passer du curatif au nécessaire, voire au récréatif, sous la pression de marchés dérégulés qui, sans l’ombre d’un doute, se seront développés hors de nos frontières. Que restera-t-il pour tempérer un tel marché ? L’éthique ? Ne finira-t-elle pas par voir dans le corps humain qu’un substrat perfectible ? Le corps médical ? Lui, entre temps, pourrait bien être devenu un acteur privé soumis aux affres de la rentabilité et de la concurrence… L’état ? Qu’en restera-t-il dans un monde de marchés supranationaux ? Le porte-monnaie des candidats à l’amélioration ? Les salaires seront-ils tous à la hauteur de telles technologies ? Tous ces éléments pourraient bien annoncer la mise en place une société inégalitaire et l’institution implicite d’un monde de privilèges technologiques… En tout cas c’est ce que nous promet Alita !!!

 


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17 févr. 2019